Nanoparticules, outils d’innovation dans le domaine biomédical
Les nanomatériaux et plus généralement les nanotechnologies recouvrent un domaine en plein essor depuis une vingtaine d’années qui devrait jouer un rôle très important dans l’économie du XXIe siècle. L’intérêt majeur de ces nano-objets repose sur les propriétés inhérentes à leur morphologie et à leur taille. En effet, la réduction de la taille de diverses structures en deçà du micromètre a permis de mettre en évidence de nouvelles propriétés non observées à des tailles plus conventionnelles. Ainsi, ces nanomatériaux sont retrouvés dans de nombreux secteurs tels que l’électronique, l’informatique, la téléphonie mobile, le sport, les textiles, le bâtiment, l’automobile, mais également l’alimentation, la santé et les produits cosmétiques. Les nanomatériaux promettent des avantages significatifs dans ces différents domaines, notamment en médecine au niveau du diagnostic et du traitement. Ils permettent l’obtention de meilleurs rendements énergétiques, de matériaux plus légers, plus solides et à meilleur marché, de produits électroniques plus rapides et plus puissants. Ils sont également efficaces dans le traitement de l’eau (Afsset, 2010).
- 1 . Définition du terme : « nanoparticules »
- 1.2. Définition de l’Union Européenne 2011/696/UE
- 2. Développement de nanoparticules et « drug delivery »
- 3. Utilisation des micro / nanoparticules en dermatologie
- 3.1 Nanoparticules et photoprotection
- 3.2 Nanoparticules et Désordres capillaires
- 3.3 Nanoparticules et Ciblage des glandes sébacées
- 3.4 Nanoparticules et Crèmes antiseptiques
- 3.5 Nanoparticules et Photothérapie
- 3.6 Nanoparticules et Dermatothérapie locale
- 3.7 Nanoparticules et Thérapie génique
- 3.8 Nanoparticules et vaccination
- 4. Conclusion
- Bibliographie
1 . Définition du terme : « nanoparticules »
1.1. Norme ISO TS/27687
Une nanoparticule est définie par la norme ISO TS/27687 comme étant un nano-objet dont les trois dimensions sont à l’échelle nanométrique, c’est-à-dire une particule dont le diamètre nominal est inférieur à 100 nm environ. Une autre définition, plus large, qualifie de « nanoparticule » un assemblage d’atomes dont au moins une des dimensions se situe à l’échelle nanométrique (ISO, 2008).
1.2. Définition de l’Union Européenne 2011/696/UE
Un nanomatériau est un matériau naturel, formé accidentellement ou manufacturé contenant des particules libres, sous forme d’agrégat ou sous forme d’agglomérat, dont au moins 50% des particules, dans la répartition numérique par taille, présentent une ou plusieurs dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm. Dans des cas spécifiques, lorsque cela se justifie pour des raisons tenant à la protection de l’environnement, à la santé publique, à la sécurité ou à la compétitivité, le seuil de 50 % fixé pour la répartition numérique par taille peut être remplacé par un seuil compris entre 1 % et 50 % (Union Européenne, 2011).
1.3. Définition du Règlement cosmétique européen
Les nanoparticules sont des matériaux insolubles ou bio-persistants fabriqués intentionnellement et se caractérisant par une ou plusieurs dimensions, ou une structure interne, sur une échelle de 1 à 100 nm (Règlement européen, 2013).
Il n’existe donc pas une seule définition réglementaire du terme « nanoparticule ». Les particules étudiées au cours de ces travaux possèdent une taille supérieure à 100 nm, elles sont qualifiées de particules submicroniques. Néanmoins, dans le domaine scientifique, ces particules sont également appelées « nanoparticules ».
Les particules submicroniques possèdent une taille comprise entre 100 nm et 1 µm. Dans le vivant ces structures se situent donc entre l’échelle du virus (≈100 nm) et l’échelle de la bactérie (≈1 µm).
Leur faible taille leur confère une grande surface spécifique, assurant leur stabilité. En effet, les nanoparticules (NPs) peuvent former des suspensions homogènes, sans phénomène de sédimentation ou de crémage. De plus, le passage de principes actifs (molécules chimiques, médiateurs, métabolites…) à l’intérieur des cellules se fait par l’action de pores de taille nanométrique. Ainsi, les NPs peuvent aisément franchir les membranes biologiques facilitant ainsi le transport d’actifs jusqu’à leur cible. Leur utilisation dans le domaine médical a ouvert un nouveau domaine de recherche nommé : « new drug delivery ».
2. Développement de nanoparticules et « drug delivery »
Dans le domaine de la Santé, les NPs sont utilisées en tant que vecteurs de principes actifs pour le traitement de pathologies, ou comme marqueurs pour le diagnostic en imagerie tissulaire. Ces nano-objets peuvent ainsi apporter d’une manière spécifique les substances actives dans les tissus à traiter en évitant les effets indésirables du principe actif (PA) sur le reste de l’organisme et en favorisant les passages transmembranaires et/ou intracellulaires (AFSSAPS, 2011).
2.1. Les différents types de NPs
La définition de nanoparticules, donnée précédemment, intègre seulement une notion de taille et non pas de type de matériau ; cependant, il existe un grand nombre de structures. Ces vecteurs peuvent néanmoins être regroupés en deux grandes familles : les NPs dégradables qui n’entrainent pas de risques d’accumulation dans les tissus et les NPs non dégradables qui présentent souvent des propriétés optiques pour l’imagerie médicale.
2.1.1. Nanoparticules non dégradables
Ces NPs ont été développées pour obtenir de nouvelles propriétés découlant de leur taille. Elles possèdent un large champ d’application . Cette catégorie regroupe des NPs rigides possédant des formes variées comme des sphères, des ellipses, des aiguilles, des tubes…. Ce type de NP est biocompatible mais non biodégradable.
2.1.1.1. Les fullerènes
Ces structures carbonées ont été découvertes en 1985 par Harold Kroto, Robert Curl et Richard Smalley (Kroto, 1985) en vaporisant du graphite par laser dans une enceinte d’hélium et en mesurant le spectre de masse du carbone. Les objets prennent la forme d’une sphère, d’un ellipsoïde, d’un nanotube ou encore d’un anneau. Ils comportent 60 à 70 atomes agencés en pentagones et en hexagones, et présentent une grande stabilité.
Les fullerènes étant des assemblages atomiques creux, on peut y introduire des atomes étrangers, notamment métalliques (La, Ni, Na, K, Rb, Cs) utilisés pour l’imagerie médicale ou des principes actifs essentiels au niveau thérapeutique. Les molécules de fullerène peuvent aussi s’arranger selon un réseau cristallin pour former des nanotubes. Ils sont peu solubles dans l’eau (1,3×10-11 mg.mL-1) (Bouchard, 2008) et forment des suspensions colloïdales (Farré, 2010).
2.1.1.2. Les nanoparticules métalliques
Une grande partie des métaux possèdent des propriétés spécifiques à l’échelle nanométrique, des NPs d’or, d’argent, de silice, de fer…. sont ainsi développées. Les NPs d’or sont particulièrement étudiées en tant que marqueurs optiques. En effet, elles présentent un spectre de résonance dans le visible sensible aux conditions expérimentales, à la taille et à la forme de la NPs (Liu, 2007 ; Parak, 2003). Les NPs magnétiques sont le plus souvent réalisées à partir d’oxydes de fer super-paramagnétiques (Cheon, 2008). Les oxydes de zinc et de titane sont principalement utilisés dans les crèmes solaires en tant que filtres solaires (Afsset, 2008).
2.1.1.3. Les puits quantiques
Ces structures d’appellation anglophone « quantum dots », ont été découvertes en 1980 par Louis E Brus (Ostiguy, 2010). Ils sont composés de combinaison d’éléments des groupes II et IV ou des groupes III et V du tableau périodique de Mendeleïev. Le plus souvent, les associations suivantes sont retrouvées : cadmium / sélénium, cadmium / tellure, indium / arsenic ou indium / phosphore. Le nombre d’atomes des puits quantiques peut varier de 1 000 à 100 000 et leur association présente des dimensions plus petites que le rayon de Bohr (mesurant entre 2 et 10 nm de diamètre). Ils démontrent ainsi des propriétés optiques et électroniques dues à leur confinement quantique ; ils peuvent, par exemple, absorber la lumière blanche ou ultraviolette et la réémettre à une longueur d’onde spécifique en quelques nanosecondes (Aitken, 2004).
La flexibilité des puits quantiques et les propriétés optiques associées permettent d’envisager des applications dans le domaine médical. Ils sont notamment mis en œuvre lors de marquage biologique en tant que sondes cellulaires, les cellules sont marquées par des quantum dots, réinjectées au patient et suivies en microscopie. Des marquages multi-couleurs sont possibles avec de telles structures. Leur important rapport surface / volume offre la possibilité de les conjuguer à des anticorps, à des protéines et à des oligonucléotides. Ils sont également modifiées afin de vectoriser des médicaments et des outils de diagnostics (Michalet, 2005).
Néanmoins, un inconvénient majeur reste leur toxicité in vivo.
2.1.2. Nanoparticules dégradables
Ces NPs sont généralement composées de lipides, de sucres, ou de polymères dégradables et peuvent être dispersées dans des solutions aqueuses, des crèmes ou d’autres types de formulations. Les particules dispersées peuvent être solides, fluides ou dans un état de gel, rigides ou déformables. En fonction du type de matériau utilisé et du pH, les NPs peuvent être chargées en surface. Cette caractéristique est très importante ; en effet, elle permet de s’affranchir des phénomènes d’agrégation, les particules chargées se repoussant. De plus, leurs tailles sont très variées s’étendant de quelques dizaines à mille nanomètres.
2.1.2.1. Les nanoparticules polymériques
En 1979, Couvreur et al. mettent au point les premières NPs polymères à base de poly-(alkyl-cyanoacrylates) (Couvreur, 1979). Depuis les recherches autour de ces structures n’ont cessé de se développer et de nouveaux polymères ont été utilisés comme notamment, les poly-(acide lactique) (PLA), le poly-(acide glycolique) (PGA) et leur copolymère le poly-(lactide-co-glycolide) (PLGA) présentant de nombreuses masses moléculaires mais également des copolymères basés sur des polypeptides ou des polynucléotides (Kumar, 2006). Ces polymères sont biocompatibles et biodégradables et leur utilisation dans le secteur de la Santé est autorisée par les autorités mondiales comme la Foods and Drug Adminstration et par la Pharmacopée Européenne (Truchon, 2008). Leur dégradation n’entraine pas la formation de métabolites toxiques pour l’organisme (Chernenko, 2009 ; Nanaki, 2011) et leur grande stabilité leur confère des caractéristiques essentielles pour leur emploi dans le domaine biomédical. Les NPs polymères possèdent généralement une forme sphérique et sont rigides. Il en existe deux types à savoir les nanosphères et les nanocapsules. Au sein des nanosphères, le PA est dispersé dans l’intégralité de la structure, tandis qu’au sein des nanocapsules, le PA est dans un vecteur liquide, le plus souvent une huile, se trouvant au centre de la structure (Koo, 2005).
- Représentation des nanosphères et des nanocapsules
Malgré tous ces avantages, leur utilisation reste encore faible. En effet, leur procédé de synthèse faisant appel à l’utilisation de solvants organiques, des problèmes de cytotoxicité sont parfois observés (Smith, 1998) et les méthodes d’obtention sont souvent difficilement industrialisables et aboutissent souvent à des suspensions colloïdales de faibles concentrations (≈2 %).
Les dendrimères
Mise au point en 1979 par Tomalia et al. (Tomalia, 1985), les dendrimères adoptent une forme dite « d’arbres » et sont obtenus par l’assemblage de monomères, nécessitant de nombreuses étapes de synthèse. Leurs propriétés varient donc en fonction des monomères employés. Ils peuvent arborer des zones hydrophobes ou hydrophiles, chargées ou non, en fonction des caractéristiques souhaitées. La présence par exemple de groupes carboxyliques leur apporte un caractère hydrophile. Leur taille est généralement comprise entre 1 et 100 nm. Ils possèdent donc une structure contrôlée atome par atome, mais le procédé de synthèse s’avère complexe et délicat (Boas, 2004).
2.1.2.2. Les nanoparticules lipidiques
Les liposomes
Les liposomes sont des vésicules formées de bicouches lipidiques concentriques, constituant une zone hydrophobe propre à la vectorisation de molécules hydrophobes et présentant un cœur hydrophile spécifique à la vectorisation de molécules hydrophiles (Mozafari, 2008). Le plus souvent, ils sont à base de phospholipides et de molécules de cholestérol, et possèdent une taille de 30 nm à plusieurs micromètres.
- Représentation schématique de la structure des liposomes
Dans le domaine biomédical, ces structures déformables sont des transporteurs de principes actifs thérapeutiques ou d’agents d’imagerie présentant une forte biocompatibilité (Gregoriadis, 1976). La quantité de cholestérol présent est étroitement liée à la rigidité de la structure. Ces particules sont depuis de nombreuses années utilisées comme outils pour la biologie, la biochimie et la médecine en tant que transporteurs de principes actifs thérapeutiques ou d’agents d’imagerie. Leur caractère non toxique et biocompatible fait de ces colloïdes des systèmes intéressants pour les applications in vivo. Néanmoins, leur utilisation est gouvernée par quelques limitations incluant une stabilité modérée, une faible capacité d’encapsulation, et une libération précoce des principes actifs (Pinto-Alphandary, 2000). Ainsi, une nouvelle génération de liposomes a été développée afin de pallier ces désavantages. Ils portent le nom de niosomes, éthosomes et polymersomes...
Les niosomes ont été développés pour augmenter la stabilité des liposomes. Ils sont préparés à partir d’un mélange de tensioactifs non ioniques et de cholestérol ; parfois une faible quantité de phospholipides est ajoutée (Mukherjee, 2007).
Les éthosomes présentent une plus grande élasticité des vésicules due à la présence de 20 à 45 % d’éthanol. Ce type de particule est généralement anionique et leur membrane lipidique est fluide (Mbah, 2014).
Les polymersomes sont composés de copolymères blocs, comportant des zones hydrophiles et hydrophobes, au cœur aqueux (Zhao, 2014).
Les nanoparticules lipidiques solides
Ce type de NPs a été introduit dans les années 90, pour proposer une alternative à l’utilisation de nano-émulsions (Magenheim, 1993 ; Benita, 1986a, 1986b). Elles se placent aujourd’hui comme des vecteurs d’intérêt permettant de pallier les problèmes liés aux autres formes nanoparticulaires comme les liposomes, les NPs polymères…. inconvénients liés aux résidus de solvants organiques restant après la synthèse, aux problèmes de cytotoxicité, de production à grande échelle, ou encore de stabilité dans le temps.
Elles sont constituées de lipides solides à température ambiante (le plus souvent à base de glycérides, d’acides ou d’esters gras) (Mehnert, 2001). Elles portent l’appellation anglophone de « Solid Lipid Nanoparticles » (SLN). Cette matrice lipidique, plus ou moins cristallisée, est stabilisée par une couche de tensioactifs (le plus souvent non ioniques). Les principales techniques d’obtention de ces structures sont réalisées en l’absence de solvants organiques.
Dans cette catégorie de NPs, sont retrouvées également les nanocapsules lipidiques communément appelés Lipid Nanocapsules (LNC), à la différence des SLNs, ces dernières possèdent un cœur liquide entouré d’une coque solide. De telles structures présentent néanmoins des inconvénients : des phénomènes d’agrégation peuvent être observés dans le temps, les systèmes ont tendance à gélifier spontanément, de manière imprévisible et pour les SLNs des transitions polymorphiques de lipides surviennent parfois (Müller, 1995).
2.2. Nanoparticules et enjeux thérapeutiques
Avec le développement de la Recherche autour des nanotechnologies, les avancées dans ce domaine se sont multipliées ainsi en quelques années, trois générations de nanoparticules ont vu le jour.
2.2.1. Première génération de nanoparticules
Ces vecteurs ont principalement été développés pour l’administration intraveineuse. L’objectif premier de leur utilisation dans le domaine médical résidait principalement dans leur capacité à éviter l’élimination précoce et l’excrétion par le système rénal après leur administration. En effet, les NPs de quelques nanomètres peuvent aisément passer par les pores rénaux. Néanmoins, dans le sang, les NPs sont reconnus comme « corps étrangers » par le système immunitaire et sont souvent pris en charge par les macrophages . Ainsi pour éviter cette phagocytose, une stratégie de fonctionnalisation a été mise en place pour leurrer les défenses immunitaires et ainsi atteindre les cibles biologique..
- : Représentation schématique d’une nanoparticule de première génération
2.2.2. Deuxième génération de nanoparticules dites « furtives »
Le but de ces vecteurs est de transporter le principe actif jusqu’à sa cible biologique et de prolonger la durée de vie dans la circulation sanguine (Torchilin, 2006). La diminution du métabolisme du PA et de son élimination par les mécanismes naturels permet également de réduire les problèmes de toxicité. En effet, l’accumulation de molécules actives dans les organes d’élimination comme le foie, le rein, la rate… peut s’avérer toxique et entrainer des effets secondaires. Dans le sang, les NPs sont rapidement recouvertes d’opsonines reconnues par les macrophages du foie, de la rate, des poumons ou encore par les macrophages circulants. Les NPs sont recouvertes de polyéthylène glycol (PEG) rendant les particules plus hydrophiles et créant un encombrement stérique, permettant ainsi d’éviter le processus d’opsonisation. Elles sont ainsi rendues furtives. Néanmoins, ce procédé dépend fortement du type de NPs sur lequel le PEG est greffé. Le dextran est également utilisé pour augmenter la furtivité (Moghimi, 2001, 2003 ; Monfardini, 2003).
- Représentation schématique de la structure d’une nanoparticule « furtive » recouvert de PEG : NPs de deuxième génération
2.2.3. Troisième génération de nanoparticules dites « ciblantes »
Afin de garantir la délivrance du PA à sa cible biologique, la surface des NPs furtives a été fonctionnalisée par des ligands biologiques (anticorps, peptides, saccharides, oligonucléotides ou des molécules sécrétées par les cellules comme le folate). Afin de ne pas interagir avec les PEG, des bras « espaceurs » sont utilisés, garantissant également une plus grande liberté de mouvement (Tada, 2007 ; Cai, 2006 ; Yang, 2008 ; Farokhzad, 2006 ; Zhang, 2007).
- Représentation schématique de la structure d’une nanoparticule « furtive » recouvert de PEG et de ligands greffés sur des bras « espaceurs » : NPs de troisième génération
Malgré ces stratégies, peu de spécialités sous forme de NPs présentent aujourd’hui une autorisation de mise sur le marché en France (Tableau ci-dessous). De nombreuses autres structures de NPs visant la délivrance de médicaments sont actuellement en cours d’études précliniques et cliniques. Ce sont principalement des liposomes incorporant des molécules hydrophiles, ou des SLNs, de protéines ou de polymères biodégradables encapsulant des molécules lipophiles.
- Médicaments sous forme de NPs commercialisés en France en 2010 (AFSSAPS, 2008)
2.3. Nanoparticules, outils de diagnostic
Les NPs sont également mises au service du développement de produits de contraste pour augmenter la résolution des images médicales pénétrant aisément dans les cellules et notamment les cellules tumorales. Les seuils de spécificité et de sensibilité sont ainsi augmentés et permettent un diagnostic plus fiable et une prise en charge plus rapide de la maladie. La détection est alors réalisée par microscopie optique, microscopie électronique à transmission, ou par imagerie par résonance magnétique. (AFSSAPS 2010). De nombreux médicaments sont en cours de développement seul l’Endorem® et le Resovist® ont été commercialisés en France. Ces deux médicaments sont composés d’oxyde de fer (Tableau ci-dessus).
Nanoparticules et théranostiques
Le concept des nanoparticules multifonctionnelles ou nanotheranostiques permet d’imaginer des NPs remplissant simultanément plusieurs fonctions thérapeutiques et diagnostiques (Arias, 2001 ; Sempere, 2011). Elles comportent ainsi des agents de furtivité, de ciblage, de contraste et des substances actives. Des agents d’activation sont également retrouvés permettant la libération contrôlée du principe actif sous l’effet de stimuli extérieurs comme le pH, l’application d’ultrasons ou de chaleur dans la zone cible. Outre la délivrance de principes actifs, d’ADN ou d’ARN, les NPs sont utilisées dans le développement de nouvelles thérapies incluant la radiothérapie (Li, 2004), la thermothérapie (Ito, 2005 ; Wust, 2006) ou encore la thérapie photo-dynamique (Wilson, 2008 ; Kopelman, 2005). Dans ces trois cas, les NPs sont les vecteurs d’agents thérapeutiques incluant des sources radioactives, matériau engendrant l’hyperthermie ou la photosensibilisation dans les zones souhaitées.
2.4. Toxicité des NPs
L’expansion rapide des nanotechnologies a encouragé les autorités sanitaires et la communauté scientifique à s’intéresser aux problèmes toxicologiques liés à leur utilisation. Ainsi une nouvelle sous-discipline de la toxicologie a été créée : « la nanotoxicologie » Pour des formes plus conventionnelles, le profil toxicologique est souvent lié à la dose administrée. Dans le cas des NPs, cette corrélation n’est pas retrouvée. Généralement, la diminution de taille des particules induit une plus forte toxicité que les formes de tailles plus conventionnelle. La toxicologie des NPs est réalisée en étudiant la viabilité cellulaire, la réponse inflammatoire, le stress oxydant , ou encore les dommages induits à l’ADN (Afsset, 2008). De manière générale, il a été observé que les NPs présentent certains comportements similaires aux virus notamment au niveau des interactions avec les cellules (Oberdorster, 2007).
Pour évaluer la toxicité des matériaux plus conventionnels, seules la nature chimique et la concentration massique sont prises en compte. Or, pour les NPs, ces paramètres ne sont pas suffisants, ils doivent être complétés par la prise en considération de beaucoup de facteurs comme la taille, la quantité, la structure, la surface spécifique, la réactivité de surface, les capacités d’agrégation, la présence de surfactants, de solvants et enfin la voie d’administration. Trois voies d’entrée sont principalement étudiées aujourd’hui in vivo et surtout in vitro : l’inhalation, l’ingestion et la pénétration transcutanée (Truchon, 2008 ; Nel, 2006 ; Magrez, 2006). De par leur faible taille, il est difficile d’observer les NPs directement dans les cellules ou dans les tissus. Les trois méthodes qui peuvent être utilisées sont la microscopie électronique à balayage, la microscopie électronique de transmission et la microscopie de force atomique.
Taille
La réduction de taille à l’échelle nanométrique augmente la surface spécifique, il y a donc plus de molécules chimiques pouvant réagir avec leur environnement et ainsi une augmentation des effets toxiques (Linkov, 2008 ; Hyuk Suh, 2009). Les NPs pourraient alors être absorbées par les tissus. Après administration, 33 % de NPs de 50 nm, 26 % de NPs de 100 nm, 10 % de NPs de 500 nm ont été retrouvées dans les muqueuses et les tissus lymphatiques de l’estomac. Il a ainsi été conclu que les NPs de taille inférieure à 100 nm étaient absorbées par les cellules de l’intestin contrairement aux molécules les plus larges et les particules de taille supérieure à 500 nm ne passant pas dans la circulation sanguine (Hyuk Suh, 2009). L’absorption des NPs de taille inférieure à 100 nm est augmentée dans les tissus lymphatiques comparée à celle dans les cellules intestinales (Ai, 2011). La taille se présente donc comme le facteur clé dans la prédiction du potentiel toxicologique des NPs. Il est important de s’intéresser à la taille mais également au phénomène d’agglomération touchant les NPs. Cette capacité favorise leur pénétration dans l’organisme (Preining, 1998 ; Powers, 2006). Un fois dans l’organisme, les NPs peuvent interagir avec des molécules présentes dans les milieux biologiques modifiant leur taille et leurs propriétés de surface (Powers, 2006). Sager et al. ont montré qu’il était difficile de transposer les résultats obtenus in vitro et in vivo ; en effet les caractéristiques des particules sont différentes, par exemple en solution les NPs ont tendance à s’agglomérer (Sager, 2007).
Surface des particules
Geiser et al. ont étudié les interactions entre la surface des particules et les cellules recouvrant les poumons. Ainsi en fonction de la nature de leur surface, les particules ne sont pas entièrement absorbées après exposition. Cette expérience montre que la présence d’un film de tensioactifs favoriserait l’absorption, réduisant les tensions de surface (Geiser, 2003). De plus, les groupes réactifs à la surface des NPs pourraient modifier les effets biologiques. La fonctionnalisation des NPs influence donc la cytotoxicité. Par exemple, les particules de silice recouvertes de quartz présentent une cytotoxicité, une inflammogénicité et une fibrogénicité plus faibles que des particules de silice non modifiées. Ces différences sont dues aux modifications des caractéristiques de surface. En effet, le caractère cytotoxique des NPs de silice au contact de cellules va générer des espèces radicalaires de type ROS entrainant le développement de fibroses et de cancers pulmonaires (Schins, 2002 ; Fubini, 1997). Les NPs de fer pourraient également produire ces espèces radicalaires nocives pour les cellules, cet effet est réduit lorsque ces dernières sont recouvertes d’une couche de pullulan (Singh, 2007 ; Clift Martin, 2008 ; Oberdo, 2010). D’autre part, le caractère hydrophile ou hydrophobe des NPs est également estimé pour prédire la toxicité des NPs. L’absorption des NPs produites avec des polymères hydrophobes est plus grande que celle produite avec des polymères hydrophiles (Ai, 2011). Plusieurs études s’intéressent sur les caractéristiques à utiliser pour évaluer le risque toxicologique des NPs (Kandlikar, 2007). Plusieurs auteurs présentent la surface spécifique comme l’approche privilégiée mais cette hypothèse reste controversée. Des études (Dick, 2003 ; Donaldson, 2002 ; Renwick, 2001 ; Oberdörster, 1996) soulignent qu’il n’est pas possible, actuellement, de quantifier spécifiquement le nombre et l’aire de surface d’une particule en particulier. La mesure de la masse en fonction de différentes tranches granulométriques de particules, pour une même espèce chimique, pourrait, selon certains auteurs, représenter une meilleure alternative pour l’évaluation du risque à la Santé associée à l’exposition (Afsset, 2006).
Dosage
La toxicité et les réponses obtenues dépendent du dosage (Teeguarden, 2007). Singh et al. ont étudié in vitro les effets de deux populations de particules de TiO2 de tailles comprises entre 40 et 300 nm et entre 20 et 80 nm sur des cellules pulmonaires humaines (A549). Ces chercheurs ont montré qu’une grande dose de petites particules (20 et 80 nm) serait plus toxique qu’une plus faible dose de grosses particules (40 et 300 nm) (Singh, 2007). Selon les données disponibles, il n’est pas simple de relier les effets in vitro aux effets mesurés in vivo. En effet, le plus souvent les doses in vitro et in vivo ne sont pas équivalentes. Les NPs présentes dans un même milieu de culture peuvent diffuser ou sédimenter à des vitesses différentes et affecter ainsi les doses cellulaires. Par exemple, à concentration équivalente (cm2 / mL), une NP d’argent de 15 nm serait 4000 fois plus efficace à induire des effets toxiques qu’une particule d’oxyde de cadmium dont le diamètre est de l’ordre du micron. Cependant, si l’on considère les quantités respectives de ces NPs ayant effectivement atteint les cellules, la particule d’argent n’est plus que 50 fois plus efficace à induire des effets toxiques que la particule d’oxyde de cadmium. Ainsi, il est important de quantifier les doses réelles de NPs au niveau des cellules cibles afin de valider les tests in vitro (Donaldson, 2008). La toxicité des NPs est donc difficile à déterminer et dépend de nombreuses variables. Schrurs et al. ont analysé 38 publications scientifiques portant sur les nano-silices et comparé les différents résultats obtenus. Ils montrent ainsi qu’il est impossible de trouver des corrélations ; les méthodes, les matériaux et les vocabulaires utilisés étant très différents. Une évaluation du risque est donc impossible pour l’instant. Il est donc essentiel de dresser des règles et des standards à l’échelle mondiale (Schrurs, 2012).
3. Utilisation des micro / nanoparticules en dermatologie
De nombreuses formes de NPs ont été développées pour leur application dans le traitement ou la prévention de pathologies cutanées. Les liposomes ont été très utilisés notamment dans le domaine de la photoprotection, pour le traitement des désordres capillaires ou encore pour le ciblage de la glande sébacée.
3.1 Nanoparticules et photoprotection
Les particules de dioxydes de titane et de zinc sont des filtres solaires retrouvés dans de nombreux produits cosmétiques (AFSSAPS, 2010). Les fullerènes présenteraient également cette capacité (Chirico, 2007). Les puits quantiques associés à l’oxyde de titane permettraient d’augmenter leur pouvoir de photoprotection (Mortensen, 2008).
3.2 Nanoparticules et Désordres capillaires
3.3 Nanoparticules et Ciblage des glandes sébacées
3.4 Nanoparticules et Crèmes antiseptiques
3.5 Nanoparticules et Photothérapie
3.6 Nanoparticules et Dermatothérapie locale
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3.7 Nanoparticules et Thérapie génique
3.8 Nanoparticules et vaccination
Le développement des particules polymères pour la voie cutanée a été envisagé notamment pour le transport d’antigène, ou comme agents adjuvants pour la vaccination par voie cutanée (Tableau 2) (Papakostas, 2011).
4. Conclusion
L’utilisation des nanoparticules a donc révolutionné les stratégies de traitement et de diagnostic des différentes pathologies permettant le ciblage de cellules incriminées. Elles permettent ainsi de réduire la dose administrée et de s’affranchir des effets secondaires liés à l’utilisation de forme plus conventionnelle. Au niveau du diagnostic, elles permettent d’améliorer le contraste des images et ainsi de favoriser la détection précoce des pathologies. Les spécificités de ces vecteurs en font des très bons candidats pour l’application en immuno-dermatologie permettant d’envisager de nouvelles stratégies de traitements.
Bibliographie
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